Je me souviens de son rire, aigu, sautillant. Sa moue de petite fille, son émerveillement.
Le bonheur intense de courir vers l'inconnu.
Le restaurant grandiose, fastueux où l'on imagine des assiettes élégantes, richement garnies (et beaucoup de vins).
L'école, les uniformes, les mocassins noirs portés avec des soquettes blanches. Calme studieux.
Le baiser, le premier, tendu, ému, furtif. Etre infiniment touchée par la lumière posée sur son cou -la tendresse et le désir.
L'interieur froid et (trop) bien rangé, son père en costume trois pièces, le gâteau d'anniversaire.
Le batteur manuel et la crème qu'elle goûte du bout du doigt.
Paris, les rideaux délicats de la chambre bleue, sa façon de fumer.
Les longues jupes de laines grises et ennuyeuses.
Je me souviens des larmes, même si tout cela fini bien.
En sortant du cinéma, tout ça c'est mélangé. Je me suis sentie jolie, jolie comme si un sourire mysterieux s'était posé sur moi. Jolie comme si, tellement remplie de beau, cela ne pouvait que se voir.
Si je me suis souvenue de tout cela, j'ai oublié la recette de la mousse au chocolat.
Il y avait certainement 80g de chocolat noir qui a fondu au bain marie avec un petit verre de lait. Et un jaune d'oeuf pour être onctueux. Et une banane mixée en fine purée, crémeuse. Et une pointe d'agar agar. Et un blanc battu en neige, pour aérer. Peut être un peu de sucre, à peine, pour que les amoureux du sucré qui y ont goûté soient séduits. Si vous retrouvez la recette exacte, n'hésitez pas... Il y aurait un tout petit cadeau imagé à gagner... Enfin, si vous le voulez bien...